DANSE THERAPIE

 

 

 

 

Introduction

« La danse est l’art du corps en mouvement » J.Vaysse

« Le corps est éminemment un espace expressif » Merleau-Ponty

 

 La danse n’est qu’une suite de mouvements corporels (gestes, sauts, pas) effectués en rythme, en cadence, par un ou plusieurs personnes en couple ou en groupe, habituellement accompagnés d’une musique. Le dictionnaire Larousse explique la danse comme « un art de s’exprimer en interprétant des compositions chorégraphiques» ou je rajouterai ‘corps et graphique’.

Les expressions françaises utilisant le mot « danse » comme ‘recevoir une danse’, ‘donner une danse’, ‘mener la danse’, ‘entrer en danse’ renvoie à l’idée de l’acte, de l’agir, du mouvement et/ou de l’investissement, de l’engagement. La plus connue « Quand le chat n’est pas là, les souris dansent ». amène l’idée d’une liberté d’agissement lorsqu’il n’y a pas de surveillance. Le champ médical utilisera aussi ce terme « Danse de Saint-Guy »  pour désigner une maladie nerveuse se manifestant par des mouvements brusques et désarticulés.

 

La danse vient donc par sa définition nous montrer sa qualité d’expression. Son étymologie désigne une chaine, une file. L’allemand présente Reigen (« danse », Tanz est un emprunt postérieur aux langues latines) et Reihe (« file », « rangé »). Il nous renseigne alors sur sa capacité de liaison entre plusieurs choses, ici les mouvements.

 

 

 

 

La dansethérapie c'est quoi ?

 

La danse therapie n’est pas un cours de danse. Nous n’apprenons ni choregraphie, ni technique. Nous sommes au coeur de l’expression corporelle libre. Nous nous intéressons ici au mouvement dansé et comment cela vient raisonner en vous en lien avec
votre histoire, vos émotions, vos sensations passées et actuelles.

La dansethérapie est au carrefour de plusieurs pratiques corporelles et artistiques au delà des
aspects fondamentaux de la psychothérapie. Nous pouvons retrouver des sources autour de la
danse, la relaxation, la méthode Vittoz (s’apparentant à la pleine conscience), méthode Feldenkrais (sur la prise de conscience par le mouvement et intégration
fonctionnelle), le théâtre, l’eutonie avec la méthode Alexander (écoute et observation de ses sensations), la psychomotricité, le Body Mind Centuring…

Lors d’une séance, il peut être inclus des temps calmes plus posés et des temps plus dynamiques. Il peut être utilisé parfois des objets comme des balles, des tissus, ballons.

A l’aide d’invitations à travers des exercices, des jeux, des propositions, nous pourrons amorcer un travail thérapeutique. Ce dernier commencera et finira à chaque séance par un temps d’échange pour remettre en mouvement, en circulation des mots sur ce que vous avez vécu et ressenti pendant la séance.
Ces temps de reprises permettent ainsi de donner sens à ce que vous avez éprouvé. Nous réarticulerons ainsi le corps et l’esprit.
Nous travaillons en autre sur le lacher prise, sur comment s’autoriser un temps pour soi, se
reconnecter avec la notion de jeu et du plaisir en ressort.
L’imaginaire et la créativité peuvent être le moteur du processus.

 

Mais comment est née la thérapie par la danse ?

Nous allons tout d’abord retracer ensemble l’histoire de la danse-thérapie avec ses fondateurs, leurs conceptualisations, et son évolution dans le monde.

 

I/ Danse thérapie : émergence, développement et outils :
1/ Essence / naissance de la danse thérapie aux tats-Unis

La danse thérapie verra le jour aux Etats Unis à partir du XX ème siècle avec l’explosion du courant de la danse moderne.

 

a/ Une pionnière de la danse-thérapie : Marian Chace

 

La danse évoluera du conventionnel classique avec l’arrivée de la danse moderne crée par Isadora DUNCAN,  (1877-1927) qui privilégiait la liberté d’expression, la spontanéité, le naturel. explorant sa propre musicalité interne.

Marian CHACE (1896-1970), danseuse et professeur de danse classique et de danse moderne, s’intéressera au monde de l’handicap en travaillant dans un milieu d’enfants déficients en 1940. Elle évoluera dans son enseignement en incluant un rôle éducatif dans sa pédagogie.

Elle poursuivra son activité en créant un groupe « dance action » avec les employés de la Croix Rouge, puis en dirigeant un groupe « dance for communication » avec des malades de l’hôpital Ste Elisabeth.

En 1946, elle devient danse-thérapeute dans une clinique psychiatrique à Washington où elle exercera pendant plus de 20 ans, en travaillant notamment sur les notions d’action et de communication par la danse ou encore sur les perceptions d’un corps dansant. Elle développera une certaine écoute et perception du corps d’autrui tout d’abord par la connaissance de son propre corps. Elle montera son dispositif de manière intuitive s’appuyant sur des théories issues de la psychologie.

 

b/ Différents courants successifs sur la côte californienne :

 

Mary WHITEHOUSE (1911-1979) créa la technique du mouvement authentique. Le mouvement authentique s’appuye sur le « i am moved » comme support expressif de l’inconscient, de l’émotionnel et de l’imaginaire du sujet. « Le contraire d’être authentique est donc d’être invisible » dit Mary WHITEHOUSE. Le sujet retrouve une relation à lui-même par des mouvements non prémédités, spontanés chargés d’imagination active et d’histoire (évènements passés, roman familial, conflits récents) puisées dans la mémoire corporelle et archétypale. Pour elle, le corps est lieu d’expressivité et de paroles au travers des mouvements qui peuvent être significatifs de la personnalité du sujet.

 

2. La danse-thérapie en Europe
a/ Une évolution du mouvement authentique en Europe :

 

Plusieurs auteurs comme Trudi SHOOP, (1903-1999), formée à la danse classique et moderne avec WIGMA et LABAN, ou bien Joan CHODOROW, ancien élève de Trudi Shoop, créaient des variantes du mouvement authentique ; forme d’imagination active, en discriminant plusieurs types de mouvements : inconscient personnel, empreinte culturelle, inconscient collectif, immergés dans un processus intégratif.

 

b/ Conception de R.LABAN et BARTENIEFF :

 

En Allemagne, Rudolph Laban écrivait ses recherches sur la cinétique humaine et l’ergonomie des gestes  démontrant que l’expression de la personnalité et les composantes dynamiques du mouvement s’exprimaient l’une à travers l’autre. Il explora alors les propriétés du mouvement  selon 4 composantes : l’espace, le temps, le poids et le flux. Il développera aussi le concept de « kinésphère ». La « kinésphère » ou « espace personnel » (E.T.Hall) est un contenant déformable, non effractable, avec une élasticité souple et consistante.

Irmgard Bartenieff (1900-1981), danseuse, thérapeute a été une adepte des théories de Rudolf Laban. Par son travail avec des patients atteint de poliomyélite, elle a pu développer « les principes fondamentaux de Bartenieff ». Le but des principes fondamentaux est de développer la qualité de mouvements apportant l’expression dans le mouvement, des activités quotidiennes plus efficaces, plus agréables, la santé physique, la connaissance de soi.

En résumant, à partir du XXe siècle, l’histoire de la danse-thérapie rejoint celle de la danse moderne, libérée et expressive, qui prône un nouveau rapport au corps et dont Isadora Duncan fut le plus fort symbole. Ce courant, lié à l’humanisme, est repris aux Etats-Unis (Marian Chace, Mary Whitehouse) et en Europe (Trudi Shoop) par quelques danseuses qui utilisent la danse comme outil thérapeutique auprès d’handicapés et de malades mentaux. En Allemagne, les recherches du danseur et chorégraphe Rudolph Laban sur la cinétique humaine et l’ergonomie des gestes mettront en évidence ceci : l’expression de la personnalité et les composantes dynamiques du mouvement s’expriment l’un à travers l’autre et réciproquement.

 

c/ En France, Rosa Gaetner

 

Il faudra attendre les années 50 pour que Rosa Gaetner amène la danse dans le milieu hospitalier (pédopsychiatrique). En 1980, la médecine commence à faire des thèses sur la danse thérapie et par la suite naitra la société française de danse thérapie (SFDT : 1984).

R.Gaetner s’appuye théoriquement sur les travaux d’Henry Wallon (1942) sur le tonus musculaire, réactions émotionnelles et développement de la pensée ainsi que les travaux de J.Ajuriaguerra avec le « dialogue tonique » psycho-moteur entre la mère et son enfant. Son dispositif s’étayera principalement sur le processus d’imitation immédiate ou différée (imitation et répétition) avec la danse classique.

3/ Les pratiques corporelles utilisées

La danse-thérapie utilise différentes pratiques corporelles :

–            Danse africaine avec l’expression primitive s’appuyant sur les travaux de Katherine Dunham (1909-2006) et de Herns Duplan (spécificités de F. Schott-Billman et C.Rougemont).

–            Danse moderne-contemporaine, classique, jazz, le tango argentin, danse indienne, danses folkloriques, danses latines et la Danse-Contact-Improvisation (DCI) crée par Steve Paxton dans les années 1970. Bien d’autres danses encore ont permis d’axer le travail sur l’expression de mouvements dansés libres, improvisés et sur leur mise en forme/sens.

–            Des techniques psycho-énergétiques asiatiques sont utilisées : le qi-kong, le tai-chi, relaxation, sophrologie et yoga, do-in, (reiki)….

–            Des méthodes venant de ce que l’on nomme « l’éducation somatique » avec comme théorico-praticiens F.M. Alexander, M.Feldenkrais, P.Pilatès, B.Baindbridge Cohen avec le Body Mind Centuring (BMC), R.Laban-I.Bartenieff.

(la psychomotricité, la kinésithérapie, l’ostéopathie ont quelque similitudes d’un point de vue conceptualisation du corps)

Techniques psycho-corporelles parfois associés à la Danse-Thérapie bien qu’indépendantes =

F.M.Alexander = acteur australien, 1890. Il a travaillé dans la rééducation du mental et du corps (facilitant la respiration).

Son travail postural a favorisé la diminution de la tension musculaire et augmenté la capacité respiratoire (utilisé en musique, théâtre, danse, cirque)

M.Feldenkrais (israelien), a travaillé sur la manière de se concentrer sur l’apprentissage et le mouvement pour favoriser le bien-être et améliorer ainsi la santé. Ceci amène une prise de conscience par le mouvement et une intégration fonctionnelle.

P.Pilates (1900) a permis d’améliorer la santé physique et mentale des individus en se concentrant sur l’édification de la force du centre du corps et l’amélioration de la posture grâce à des mouvements précis, contrôlés et à la respiration.

– Le Tai chi, les arts martiaux ouvrent la porte vers des mouvements fluides contrôlés coordonnés avec la respiration.

Le Qi gong apporte un travail sur l’énergie et le souffle, amenant une régulation de la posture et de la respiration.

Le Shiatsu peut aussi être introduite dans certains exercices. C’est une thérapie japonaise traditionnelle manuelles visant à détecter et corriger les déséquilibres du Ki (Energie vitale).

La Réflexologie, issue de la thérapie zonale (massage des pieds) : est la pression sur des points sur les pieds et les mains redonnent de l’énergie dans le corps, éliminant les tensions.

Le Yoga est un développement spirituel, une relaxation et une respiration travaillant sur des postures précises (asanas) et activant aussi le contrôle de la respiration (pranayama)

EFT : technique de libération émotionnelle de Gary Craig (élève de Callahan), par des tapotements de points d’accupression, se concentrant sur des problèmes précis et en répétant des affirmations simples. Les sécretions de messages chimiques effectuent ainsi une reprogrammation mentale comme en EMDR.

Définition de la Danse Thérapie (DT)

L’ADTA, American Dance Therapy Association, a été la première fondation de la danse-mouvement-thérapie. Elle fut créée par M.Chace en 1965.

 

 J.Vaysse, dans son livre La Danse-thérapie (2006) reprendra les définitions de la DT :

 Une utilisation psychothérapeutique du mouvement et de la danse comme processus pour permettre à la personne de s’engager de façon créative dans un processus visant à favoriser son intégration physique, émotionnelle, cognitive, psychique et sociale. » (Définition de la dance Movment Therapy par l’ADTA) Selon cette auteure, la Danse-Thérapie « cherche à bousculer la structuration psycho-corporelle défaillante, à stimuler les processus de changement, de créativité, d’empathie, de transfert… pour induire une transformation durable au niveau du moi ».

 

La Société Française de Danse Thérapie, quant à elle, définit sur son site :

« La danse-thérapie reprend une fonction universelle et traditionnellement courante de la danse qui s’appuie sur la dynamique corporelle et symbolique de la danse, pour aider l’Homme à intégrer harmonieusement les différents registres qui le constituent : physique, psychique, mental et social. »,

 

La Danse-Mouvement-Thérapie, officialisée, se définit finalement  par : «  une utilisation psychothérapeutique du mouvement comme processus pour promouvoir l’intégration physique, psychique et social d’un individu » . Des danse-thérapeutes américaines contemporaines précisent qu’il y a « corrélation entre la danse/le mouvement et l’expression de l’Inconscient au travers du Ça, Moi, Surmoi, fournissant de plus un cadre pour l’établissement de relations et pour le développement de l’Image du Corps et de la personnalité » (Dosamantes, 1987)

 

« la DT utilise le mouvement comme médiateur d’une relation dont elle assure le cadre et les limites. A l’origine du travail, préexiste une alliance thérapeutique entre le ‘soignant’ et le ‘soigné’ où la danse fait tiers ». « Au centre de la pratique, l’évolution psychique ou ‘mouvement interne’, selon l’implication du patient, devient lisible à travers le mouvement dansé »,.« la DT s’applique avec profit à toutes sortes de pathologies psychiques, psychosomatiques et relationnelles, mais au-delà de ses effets thérapeutiques, elle s’inscrit aussi dans une démarche.. de ‘mieux être’ ».

 

La DT  cherche à bousculer la structuration psycho-corporelle défaillante, à stimuler les processus de changement, de créativité, d’empathie, de transfert… pour induire une transformation durable au niveau du Moi. Mais au delà d’une pathologie avérée, tout sujet désireux d’évoluer par un travail « d’affirmation de soi » ou de « développement personnel » vers un mieux être peut aussi profiter d’une technique de DT appropriée.

 

La danse-thérapie se situe au carrefour de différents champs. Il est donc très important de se questionner sur la fonction ou non thérapeutique de ces pratiques corporelles et des étayages théoriques, selon le cadre qu’on lui donne. Où commence le soin ?

 

C’est parfois le cadre qui est thérapeutique et pas forcément le contenu (exemple de personne qui exprime leur envie d’arrêter le groupe. Pourquoi…)

 

Quelle que soit la visée initiale de ces pratiques corporelles, ce qui importe est ce que l’on va en faire, et de reconnaitre nos propres dispositions à transformer, à trouver, à créer un espace thérapeutique avec des pratiques qui ne le sont pas à la base.

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